L’ART DE LA PROGRAMMATION – Un cycle de cartes blanches

Biographie Raquel Schefer

Chercheuse, cinéaste, programmatrice et enseignante à l’Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3, Raquel Schefer est docteure en Études cinématographiques et audiovisuelles à Paris 3 Sorbonne Nouvelle avec une thèse dédiée au cinéma révolutionnaire mozambicain et au cinéma de Libération. Elle est titulaire d’un Master en Cinéma documentaire de l’Université de Buenos Aires et d’une Maîtrise en communication et cinéma de la Nouvelle Université de Lisbonne. Elle a publié El Autorretrato en el Documental (L’Autoportrait dans le documentaire, 2008) en Argentine. Elle a été chercheuse invitée à l’Université de Californie à Los Angeles. Parallèlement à ses activités en tant qu’éditrice de la revue de théorie et esthétique du cinéma La Furia Umana, elle mène actuellement une recherche post-doctorale à l’Université de Lisbonne et à l’Université du Western Cape.

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Depuis octobre 2021, l’École nationale supérieure d’art de Bourges, en partenariat avec l’association Antre Peaux, investit le cinéma du foyer Saint-François à Bourges. La salle de cinéma accueille des conférences, des cours, des séminaires, mais aussi des projections et des séances publiques. Quelle est aujourd’hui la fonction d’un cinéma après la crise sanitaire ? Que montrer, et comment ? La programmation ne constitue-t-elle pas un geste artistique à part entière ?

Pour aborder ces questions, ouvrir un débat et partager des points de vue, l’ENSA Bourges et Antre Peaux proposent, avec la complicité d’Érik Bullot, cinéaste, théoricien et enseignant à l’ENSA, une série de cartes blanches confiées à des programmateurs. Chacun des invités présente un ensemble de films de son choix en vue d’exposer et d’illustrer sa conception de la programmation. Un débat sera ouvert avec le public à l’issue de la projection.

• Mardi 17 mai 2022

Raquel Schefer 
Le travail de programmation est indissociable de mes activités en tant que chercheuse en histoire et esthétique du cinéma. Ces deux volets sont enchevêtrés, car ils surgissent ensemble d’une réflexion sur les formes du politique et la politique des formes. De la même manière que dans mon travail en tant que chercheuse, j’essaie de rompre les séparations et les hiérarchies établies : tout d’abord, entre les temporalités et les géographies filmiques, aussi bien qu’entre les genres cinématographiques. Il s’agit donc d’opérer un remontage critique et de déhiérarchiser un ensemble de catégories structurant l’histoire eurocentrée du cinéma.

Cette programmation répond à ces enjeux conceptuels et méthodologiques. De Stendalì (Suonano ancora) de Cecilia Mangini à Kuychi pucha, réalisé par le cinéaste amérindien équatorien Segundo Fuérez, en passant par Killing Time de Fronza Woods, la programmation cherche à dessiner une cartographie historique et esthétique englobant différentes expériences de figuration du rituel et de ritualisation du cinéma. Cet ensemble de films défie la séparation conventionnelle entre le cinéma documentaire, le cinéma expérimental et le cinéma ethnographique, tout en mettant en évidence la dimension historique, culturelle et idéologique de cette division.

La figuration de gestes rituels — les rites mortuaires dans la région des Pouilles au sud de l’Italie dans le film de Mangini, la rotation de la caméra redéfinissant le rapport entre l’observateur et l’observé dans Amérika: Bahía de las Flechas d’Ana Vaz ou bien le geste de peigner les cheveux ouvrant tout un champ mnémonique dans Notas, Encantaciones: Parte II, Carmela d’Alexandra Cuesta — y est indissociable de la ritualisation du geste cinématographique aux niveaux formel et épistémique. Cette programmation essaie elle-même d’esquisser un geste : un geste de passage et de mise en commun au temps de la pandémie et du retour de la guerre en Europe.

Program

  • Stendalì (Suonano ancora) de Cecilia Mangini, 1959, Italie, 35 mm numérisé, couleur, sonore, 11 min.
  • Notas, Encantaciones: Parte II, Carmela d’Alexandra Cuesta, 2020, Équateur, États-Unis, 16 mm numérisé, couleur, sonore, 6 min.
  • Killing Time de Fronza Woods, 1979, États-Unis, 16 mm numérisé, noir et blanc, sonore, 10 min.
  • Amérika: Bahía de las Flechas d’Ana Vaz, 2016, République Dominicaine, vidéo numérique, couleur, sonore, 9 min.
  • Kuychi pucha de Segundo Fuérez, 2014, Équateur, vidéo numérique, couleur, sonore, 8 min

Durée totale : 44 minutes.

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